CE QUE LES HOMMES ONT MIEUX COMPRIS
Ecrasées par les responsabilités qui pèsent sur leurs épaules, de plus en plus de mères frisent le burn-out. On les invite, avant qu’il ne soit trop tard, à expérimenter 5 clichés typiquement masculins... Et si les hommes avaient (parfois) raison ?
«Les femmes passeraient entre 35 et 50 heures par semaine à s’occuper de la maison et des enfants, contre 14 pour les hommes », affirme la psychologue Violaine Guéritault dans La fatigue émotionnelle et physique des mères (Odile Jacob)... Un constat que confirme l’auteure Frédérique Corre-Montagu dans son bouquin Etre une maman organisée c’est malin (Editions Quotidien Malin) : « Son altesse le Prince ne participe qu’à 20% des tâches ménagères. Malgré l’évolution incontestable de la société et de la mentalité de nos preux chevaliers, nous (pauvres donzelles) continuons à passer trois fois plus de temps qu’eux à faire des corvées répétitives et quasi quotidiennes. » S’il est dangereux de généraliser, la réalité est néanmoins là... et les conséquences aussi. « L’épuisement maternel est un phénomène en augmentation, explique Violaine Guéritault. Des facteurs tels que la crise économique et les problèmes d’argent qu’elle engendre, la vie de plus en plus stressante, mais aussi l’éloignement géographique des proches, qui pourraient servir de personnes ressources... rendent la charge plus lourde à porter. » Mais désormais les médias évoquent régulièrement ces syndromes de fatigue extrême, aidant celles qui en souffrent à se rendre compte qu’elles ne sont pas seules et peuvent en parler sans honte, avant de chuter dans la spirale destructrice du burnout (lire par ailleurs). « C’est quand ça va vite qu’il faut prendre son temps pour réfléchir et éviter le clash », avertit Ambre Pelletier, coach maternel travaillant en France mais donnant des consultations par téléphone et Skype, en Belgique également (www.ambrepelletier.typepad.fr).
Voici cinq stéréotypes masculins à tester d’urgence pour permettre aux plus débordées de se glisser quelques instants dans la peau de leurs chers et tendres... Et piquer leurs bonnes idées.
« JE LIS MON JOURNAL »
La situation. Vous rentrez à la maison après une longue journée. Déjà, les questions fusent. « Je peux aller chez Max samedi ? », « Il est où mon pyjama ? », « Tu me fais réviser ? » Les casseroles vous font de l’oeil. La manne à linge bourrée aussi... Vous embrassez la marmaille chahutante, vous asseyez dans le fauteuil et dépliez le journal avant d’assener sans appel : « Je suis à vous dans 10 minutes. » Vous avez appuyé sur « Pause »... Bien vu. Comme le décrivait John Gray dans son best-seller Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus (J’ai Lu), ces messieurs ont besoin de s’enfermer en solitaire dans leur grotte avant de rejoindre la tribu, ce qui explique cette mi-temps de lecture, certes un peu cliché mais souvent vérifiable, qu’ils s’octroient en rentrant chez eux. Ce moment d’introspection leur permet de faire le point, de se recentrer, avant d’attaquer le second round de la journée. Ce temps mort, les mamans ne se l’accordent que rarement. Et pour cause, pour elles, retrouver leur foyer n’aurait pas cet effet apaisant. « La maison est perçue comme un lieu de détente par les hommes, pas par les femmes, constate Violaine Guéritault. Les chercheurs ont comparé la tension artérielle des pères et des mères exerçant une activité professionnelle. Pour les pères, cette tension est plus élevée au travail. Celle de leurs épouses, par contre, est la même, qu’elles se trouvent au bureau ou à leur domicile. » Et si, en s’affalant à leur tour au salon, les superwomen tordaient le cou à cette vérité scientifique ? « Elles doivent établir une règle de conduite et l’expliquer aux autres membres de la famille : “Désormais je prendrai chaque jour dix minutes pour lire mon magazine. Après, je serai de meilleure humeur pour m’occuper de vous”, suggère Violaine Guéritault. Elles doivent être conscientes qu’au début tout le monde va râler. Mais si elles ne pètent pas les plombs et tiennent bon une semaine,cela sera acquis et très bénéfique. »
« ON FAIT UNE SOIRÉE AVEC LES COPAINS »
La situation. « Allo Chérie, je viens de recevoir deux tickets pour le match de ce soir. J’y vais avec Thierry. – Euh, ah bon ? – C’est le match de l’année. – Mais qui va reprendre les enfants ? – Je te laisse voir avec ma mère. » Version féminine ça donne : « Allo Chéri, je viens de gagner deux places de ciné pour le dernier Ken Loach. J’y vais ce soir avec Marlène. – Euh, ah bon ? – C’est le film de l’année. – Mais qui va reprendre les enfants ? – Ben, toi ! »
Bien vu. Souvent, une femme pensera, même si elle s’autorise, comme son conjoint, des moments de loisirs, qu’elle est individualiste... « C’est exactement le contraire, rétorque Ambre Pelletier. Penser à soi est loin d’être un acte égoïste car, à force de ne s’occuper que des autres, on s’oublie, on se sent délaissée, on s’énerve et on devient moins disponible en fin de compte. Prendre soin de soi, c’est donc se donner les moyens de prendre ensuite soin d’autrui. » Violaine Guéritault abonde dans le même sens : « Nous ne pouvons donner quelque chose que nous n’avons pas. Ces moments de calme permettent de faire le plein d’énergie. » Fini donc la culpabilité, d’autant que ces instants de plaisir seront utiles à l’éducation des mômes : « Montrer qu’une maman est aussi une femme qui a des centres d’intérêt en dehors du foyer est un exemple à suivre pour les petits, qui grandissent et cherchent des voies pour s’épanouir », insiste Ambre Pelletier. Sans parler du coup de boost que l’absence maternelle donnera au papa :« N’hésitez pas à partir seule quelques jours, conseille Frédérique Corre-Montagu. Oui, tout va bien se passer. Oui, votre homme va assurer. L’important, c’est qu’il prenne les rênes de la maisonnée. Dans legenre “vis ma vie” il n’y a pas mieux. Par ailleurs, en instaurant officiellement des moments pour vous dans l’agenda, vous apprendrez peu à peu à la royal family à vous oublier... pour ne pas dire vous ficher la paix, même si vous n’êtes pas à l’abri d’un “Chérie, où sont les sacs poubelles ?” en pleine séance de méditation. »
« JE N’AI PAS EU LE TEMPS DE FAIRE LES COURSES »
La situation. Les rendez-vous s’enchaînent, les heures filent. Vous voilà ventre à terre pour arriver avant la fermeture de la garderie et contrainte de sauter la case Supermarché. C’est sûr, une bonne mère aurait eu le temps de remplir le frigo !
Bien vu. Plutôt que de s’offrir en sacrifice sur l’autel de la perfection jamais atteinte, pourquoi ne pas apprendre, comme les hommes savent si bien le faire, à « ne pas parler des choses mais chercher à les régler », résume Steve Harvey dans Soyez femme mais pensez comme un homme (Editions du Trésor Caché). Le garde-manger est vide ? Direction le resto ! « Dites-vous que c’est l’occasion de mettre de la créativité dans la routine, suggère Ambre Pelletier. Se tromper, oublier, c’est aussi démontrer à ses rejetons que tout le monde a droit à l’erreur. Ça peut leur donner confiance en eux. » Reste à pouvoir supporter en son for intérieur cet « écart » de conduite, et donc à accepter de devenir imparfaite ! « Demandez-vous quelle serait la pire chose qui pourrait arriver si vous deviez ne pas accomplir telle ou telle tâche. Souvent les conséquences ne sont que minimes », évalue Violaine Guéritault. « Développez des standards de qualité réalistes : visez le bien propre plutôt que le parfaitement propre. Baissez votre niveau d’exigence... Done is better than perfect », conseille Frédérique Corre-Montagu.
« MINUTE, JE NE SAIS PAS FAIRE DEUX CHOSES À LA FOIS »
La situation. Un doux fumet s’échappe de votre marmite... Dans le séjour, on vous appelle pour corriger un devoir. A l’étage, c’est la guerre pour savoir qui se lavera les cheveux en premier. Votre mari rentre et commence à vous raconter cet horrible entretien avec un client. Le téléphone sonne... Une odeur de brûlé envahit la cuisine. Vous dites : « stop ! »
Bien vu. « Quelle que soit la journée, on s’attend à ce qu’une mère soit à la fois infirmière, maîtresse, cuisinière, responsable des achats, médiatrice, chef comptable, chauffeur, jardinière, psychologue et bien plus encore... La première frustration qui résulte de la variété de ces tâches et de leur simultanéité, c’est l’impossibilité de se focaliser sur une activité », selon Violaine Guéritault. Cet inconfort permanent, les hommes l’ont résolu : physiologiquement, leur cerveau ne leur permettrait pas d’accomplir plusieurs tâches en même temps. Mais finalement, est-ce vraiment une question de capacité... ou de volonté ? Et si la femme décidait qu’elle aussi ne pouvait plus faire qu’une chose à la fois ? Pour cela, il faudra qu’elle réapprenne à utiliser un mot : « non ! » « Pour certaines, c’est une nouvelle langue à étudier car il y a une manière de le dire, précise Ambre Pelletier. Plutôt que d’asséner un “non” catégorique lorsque votre fils vous demande de jouer avec lui, utilisez une formule du genre : “J’ai envie de le faire mais en même temps, je dois faire ceci, cela... Je te propose de t’occuper seul et puis on jouera ensemble.” Il ne faut pas être vindicatif mais exposer les faits et suggérer une alternative. »
« QU’EST-CE QU’ON MANGE CE SOIR ? »
La situation. Vous êtes dans votre voiture et révisez votre to-do list d’après-boulot. Rien qu’à y penser, vous avez envie d’aller vous coucher. Vous décrochez votre téléphone pour annoncer à Chéri que vous serez là dans un quart d’heure et lâchez un anodin « Tiens, qu’est-ce qu’on mange ce soir ? » La balle est dans son camp.
Bien vu. S’il est une chose que la gent féminine est incapable de faire, dans le domaine ménager, c’est bien celle-là : déléguer. Son souci de perfection la pousse à vouloir tout contrôler, étant le plus souvent persuadée d’avoir LA technique pour accomplir chaque mission avec brio. « Beaucoup d’entre nous sont esclaves de ce sentiment. L’admettre, c’est déjà résoudre le problème à 50 % », évalue Violaine Guéritault. Une fois consciente de son incapacité à demander de l’aide, la femme devra se convaincre que, même si les choses ne sont pas faites à sa manière, la Terre continuera de tourner. « Quand vous déléguez, appliquez cette règle : “c’est celui qui le fait qui a raison”... pour éviter les tensions, écrit Frédérique Corre-Montagu. Au lieu de compliquer la tâche de vos aides en étant “exichiantes”, donnez-leur les moyens de l’accomplir correctement (instructions claires et bons outils) et filez. Et surtout n’appelez pas cinq minutes plus tard pour vérifier que tout se passe bien. Bref, lâchez prise. » La diversité dans les méthodes employées pour réaliser une mission apportera même, selon Ambre Pelletier, un plus à l’éducation des petits : « C’est une richesse d’avoir autour d’eux des gens qui font les choses différemment. Cela leur apprend le respect de l’autre et leur donne confiance en leurs propres actes. » Reste à savoir que déléguer. « Plutôt que de lancer un “qu’est-ce qu’on mange ce soir ?” de but en blanc, qui est contraignant pour l’autre, je suggérerais d’opter pour une phase de négociation, explique Violaine Guéritault. Lors d’un moment calme, se mettre autour de la table et lister les tâches. Demander à chacun lesquelles il a envie d’assumer et se répartir les plus ingrates. » Selon l’âge des enfants, ne pas hésiter à les introduire dans ce brainstorming. « Ils adorent être responsabilisés, souligne Ambre Pelletier. Ça fait partie de leur apprentissage de l’autonomie ».
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